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Pour savoir où on met les pieds...
La période celtisante.
La période latinisante.
Les envahisseurs germanophones.
... qui n’a pas grand chose à voir avec le gaulois.
La période trilingue.
L’irrésistible progression d’un dialecte roman d’Ile de France.
Quand le francien devient l’ancien français.
L’origine des langues européennes

Naissance de la linguistique historique

Au XIXème siècle, des linguistes firent une découverte surprenante. Ils remarquèrent que les langues parlées en Europe, mais aussi en Iran et dans le nord de l’Inde, se ressemblaient beaucoup comparées aux autres langues, comme par exemples les langues sémitiques (arabe, hébreux). Ainsi, mère se dit mātā́ en sanskrit, mayr en arménien, mêtêr/mâtêr en ancien grec, motrë en albanais, mātĕr en latin, máthir en vieil irlandais, muoter en haut-allemand, móðr en vieux norrois, mati en vieux slave, etc... Ils imaginèrent alors que, de la même manière que le français, l’italien, le roumain, etc... dérivent du latin, ou encore que l’anglais, le néerlandais, l’allemand, etc... dérivent du haut-allemand, ces langues anciennes pouvaient elles-même dériver d’une autre encore plus ancienne. Ils appelèrent cette langue hypothétique l’indo-européen. Au cours des décennies suivantes, ils s’employèrent à reconstituer partiellement cette langue, en se basant sur les lois d’évolution des langues qu’il avaient pu mettre en évidence en étudiant les langues anciennes connues (latin, grec ancien, etc.) et leurs descendantes modernes. Ainsi, ils parvinrent à reconstituer certains mots, tels que *mātēr pour mère [1] .

Origines de la civilisation indo-européenne

Certains mots étaient manifestement de création plus récente, et n’appartenaient pas au lexique indo-européen initial, mais d’autres émergeaient assez facilement, comme *sneigwh- pour neige, ou encore des mots pour désigner le hêtre, la pomme, la cerise, le loup, le castor, le saumon, l’anguille... ce qui donne une idée assez précise de l’origine géographique de cette langue : l’Ukraine ou le sud de la Russie actuelle. La présence de mots pour désigner des métaux tels que le cuivre, le bronze, l’or et l’argent, mais pas le fer, nous donne une idée de l’époque à laquelle cette civilisation ne constituait qu’une seule entité : la fin du IIIème millénaire avant J.-C., époque à laquelle le bronze n’est encore connu que dans cette partie de l’Europe.

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Berel’ : ornement de harnachement kourgane en forme de griffon, retrouvé dans un tumulus du nord-ouest du Kazakhstan (source : France-Diplomatie).

On a pu, de la même manière, retracer les grands traits de la culture, de la technologie et de l’histoire indo-européenne. Je donne ici la thèse la plus généralement admise, mais de très nombreuses variations existent. Ils étaient organisés en tribus guerrières. Leur société, patriarcale, distinguait nettement trois classes : les guerriers, les prêtres et les artisans. Cette répartition sociale, caractéristique, c’est notamment maintenue en France jusqu’à la Révolution, avec les trois ordres : noblesse, clergé et tiers-état. Vers -2000 (début du IIème millénaire), il s’étaient déjà séparés en plusieurs peuples bien distincts, quoique apparentés d’un point de vue linguistique, et n’hésitaient pas à se faire la guerre entre eux. L’état de guerre était d’ailleurs permanent, hormis une brève trêve hivernale. Ils avaient domestiqué le cheval, et maîtrisaient le concept de roue ; le char constituait leur engin de guerre préféré.

Par croisement avec des données archéologiques, on a pu déterminer (mais c’est très contesté), que les Kourganes, un peuple du sud de la Russie connu pour ses tumulus funéraires, pourraient être ces fameux indo-européens primitifs.

Conquête de l’Inde, de l’Asie mineure et de l’Europe

(La théorie exposée ci-après est sujette à controverse, mais a le mérite d’être la plus simple. En particulier, il semble que dans bien des cas l’influence indo-européenne se soit exercée culturellement, sasn recours à la force.)

C’est à cette époque qu’ils découvrirent le travail du fer, bien plus solide que le bronze. Dès lors, plus rien ne pouvait leur resister. Vers -1800, ils avaient conquis pratiquement toute l’Europe et une partie de l’Asie (Anatolie, Iran, Pakistan, la moitié nord de l’Inde, Bengladesh actuels). Les grandes familles de langues parlées aujourd’hui dans ces régions correspondent à autant de vagues d’invasions de peuples indo-européens. En se limitant à la seule Europe, on peut distinguer six grandes phases d’invasions, correspondant aux six familles de langues indo-européennes présentes en Europe. Les voici dans l’ordre chronologique (toutes eurent lieu entre -2000 et -1800 environ) :
- les hellènes conquirent la Grèce ;
- la latins (italiques) conquirent le Latium (Italie centrale) ;
- les slaves conquirent l’est de l’Europe ;
- les celtes conquirent l’Europe centrale ;
- les germains conquirent à leur tour l’Europe centrale, repoussant les celtes vers l’Ouest (le sud leur était interdit par les latins et les hellènes) ;
- enfin les baltes conquirent les rives orientales de la mer Baltique.

En Europe occidentale, la seule langue ayant résisté à ces invasions est le basque, toutes les autres langues sont des dialectes de l’indo-européen.

Chacun de ces peuples envahisseur parlait une langue issue de l’indo-européen, mais déjà bien différenciée. C’est pourquoi on distingue en Europe les langues d’origine latine, slave, celtique, germanique, etc... pour ne citer que les plus connues.

Aujourd’hui, la moitié de l’humanité parle une langue indo-européenne.

Références

Les techniques de reconstruction de l’indo-européen primitif.

La reconstruction de l’indo-européen primitif.

La civilisation indo-européenne, lien avec la langue.

La culture indo-européenne.

L’arbre de descendance des langues indo-européennes

Les langues indo-européennes aujourd’hui.

Caractéristiques de l’indo-européen primitif.

 
Notes:

[1] L’astérisque devant le mot signifie qu’il s’agit d’une reconstitution hypothétique, et qu’il n’est pas attesté.


Page publiée le 26 mars 2006 par achille .
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